mercredi 13 juin 2012

CAF : des allocataires de plus en plus pauvres en Côte-d’Or

Les aides sociales ne suffisent plus aux foyers modestes. Témoignages avec les travailleurs sociaux de la Caf et de l’association Acodege de Dijon.

Les loyers qui augmentent. Les factures d’énergie qui explosent. Ces deux réalités appauvrissent fatalement les foyers modestes. Dans son bilan 2011, la Caf parle désormais « d’allocataires et de travailleurs pauvres ». 
 

Photo Philippe Bruchot

« Il s’agit de personnes dont les revenus restent inférieurs à 982 € après le versement de leurs prestations sociales », explique Violettes Socquard, chargée d’études à l’observatoire social et stratégique de la Caf de Dijon. Soit aujourd’hui 27 % des allocataires de la CAF. « Les familles avec enfants s’en sortent un peu mieux que les personnes seules grâce à certaines prestations familiales. L’allocation de rentrée scolaire (ARS) par exemple qui sera de 388 € à la saison prochaine représente une vraie bouée de sauvetage pour les familles. »

N’empêche, se loger et payer les factures d’eau et d’électricité reste un casse-tête pour les foyers modestes. Y compris – et le phénomène se développe pour les personnes qui travaillent. Violette Socquard est catégorique : « 69 % des allocataires Caf sont aujourd’hui des travailleurs. 

Le problème du maintien au logement avec celui de l’emploi demeure le seul et vrai problème pour tout le monde. Les aides ne suffisent plus. » En effet, plus de 56 % des allocataires Caf perçoivent des aides aux logements. Et pourtant, les signalements de loyers impayés ne cessent d’augmenter d’années en années : 484 impayés en 2009, 831 en 2010 et 1 428 en 2011. « Avant, les personnes en difficulté venaient nous voir avec un minimum de ressources. Aujourd’hui, elles n’ont plus rien. Il nous est de plus en plus difficile de travailler sur des projets d’actions avec elles. Nous n’avons plus de solutions à leur proposer. »


« Tout se tient dans le malheur »



Les travailleurs sociaux de terrain, poussent le même cri d’alarme. La colère en plus. « Par pitié, ne nous parlez plus d’assistanat ! La crise n’est pas virtuelle. Nous la constatons chaque jour dans les familles. Nous travaillons avec des personnes qui cherchent du boulot, des personnes sous payées ou sous qualifiées, des personnes isolées dans les campagnes, des personnes mal logées. Pour ces familles, se nourrir, se loger, se chauffer, se déplacer, faire garder un enfant pour aller travailler, coûte cher. Tout se tient dans le malheur », lancent Jocelyne Biniek et Caroline Loreau, éducatrices spécialisées au sein du service des mises sous tutelles des prestations sociales à l’association Acodège de Dijon. 

Elles accompagnent 203 familles, 640 mineurs sur la Côte-d’Or. Et tiennent à rappeler que « toutes les familles pauvres ne sont pas sous tutelles. Que l’écran plat XXL payé avec l’ARS qui trône dans le salon est un fantasme ». En revanche, les raisons de la misère sont partout les mêmes : « Le coût de l’énergie et des charges fixes est devenu si exorbitant qu’il pulvérise le budget des familles. Lorsqu’une facture d’eau de 800 € tombe tous les 6 mois dans un foyer qui perçoit 300 € de RSA comment faire ? Il nous arrive de payer les dettes des familles avec des allocations dédiées aux enfants. »

Comme Violette Socquard, les éducatrices se sentent démunies. « Notre métier aujourd’hui est de gérer la misère, l’urgence. Et en cette période de restriction budgétaire, c’est de plus en plus compliqué pour nous. On nous demande d’être créatifs et imaginatifs pour aider les gens. Mais la réalité sur le terrain est là : nous sommes à cours de solutions. »
 
 Source : Le bien Public - Céline WALTER - Dimanche 10 juin 2012

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