Les aides sociales ne suffisent plus aux foyers modestes.
Témoignages avec les travailleurs sociaux de la Caf et de l’association
Acodege de Dijon.
Les loyers qui augmentent. Les factures d’énergie qui explosent. Ces
deux réalités appauvrissent fatalement les foyers modestes. Dans son
bilan 2011, la Caf parle désormais « d’allocataires et de travailleurs
pauvres ».
Photo Philippe Bruchot |
« Il s’agit de personnes dont les revenus restent inférieurs à
982 € après le versement de leurs prestations sociales », explique
Violettes Socquard, chargée d’études à l’observatoire social et
stratégique de la Caf de Dijon. Soit aujourd’hui 27 % des allocataires
de la CAF. « Les familles avec enfants s’en sortent un peu mieux que les
personnes seules grâce à certaines prestations familiales. L’allocation
de rentrée scolaire (ARS) par exemple qui sera de 388 € à la saison
prochaine représente une vraie bouée de sauvetage pour les familles. »
N’empêche,
se loger et payer les factures d’eau et d’électricité reste un
casse-tête pour les foyers modestes. Y compris – et le phénomène se
développe pour les personnes qui travaillent. Violette Socquard est
catégorique : « 69 % des allocataires Caf sont aujourd’hui des
travailleurs.
Le problème du maintien au logement avec celui de l’emploi
demeure le seul et vrai problème pour tout le monde. Les aides ne
suffisent plus. » En effet, plus de 56 % des allocataires Caf perçoivent
des aides aux logements. Et pourtant, les signalements de loyers
impayés ne cessent d’augmenter d’années en années : 484 impayés en 2009,
831 en 2010 et 1 428 en 2011. « Avant, les personnes en difficulté
venaient nous voir avec un minimum de ressources. Aujourd’hui, elles
n’ont plus rien. Il nous est de plus en plus difficile de travailler sur
des projets d’actions avec elles. Nous n’avons plus de solutions à leur
proposer. »
« Tout se tient dans le malheur »
Les
travailleurs sociaux de terrain, poussent le même cri d’alarme. La
colère en plus. « Par pitié, ne nous parlez plus d’assistanat ! La crise
n’est pas virtuelle. Nous la constatons chaque jour dans les familles.
Nous travaillons avec des personnes qui cherchent du boulot, des
personnes sous payées ou sous qualifiées, des personnes isolées dans les
campagnes, des personnes mal logées. Pour ces familles, se nourrir, se
loger, se chauffer, se déplacer, faire garder un enfant pour aller
travailler, coûte cher. Tout se tient dans le malheur », lancent
Jocelyne Biniek et Caroline Loreau, éducatrices spécialisées au sein du
service des mises sous tutelles des prestations sociales à l’association
Acodège de Dijon.
Elles accompagnent 203 familles, 640 mineurs sur la
Côte-d’Or. Et tiennent à rappeler que « toutes les familles pauvres ne
sont pas sous tutelles. Que l’écran plat XXL payé avec l’ARS qui trône
dans le salon est un fantasme ». En revanche, les raisons de la misère
sont partout les mêmes : « Le coût de l’énergie et des charges fixes est
devenu si exorbitant qu’il pulvérise le budget des familles. Lorsqu’une
facture d’eau de 800 € tombe tous les 6 mois dans un foyer qui perçoit
300 € de RSA comment faire ? Il nous arrive de payer les dettes des
familles avec des allocations dédiées aux enfants. »
Comme
Violette Socquard, les éducatrices se sentent démunies. « Notre métier
aujourd’hui est de gérer la misère, l’urgence. Et en cette période de
restriction budgétaire, c’est de plus en plus compliqué pour nous. On
nous demande d’être créatifs et imaginatifs pour aider les gens. Mais la
réalité sur le terrain est là : nous sommes à cours de solutions. »
Source : Le bien Public - Céline WALTER - Dimanche 10 juin 2012
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