Depuis 2009, le tribunal correctionnel de Strasbourg regroupe en une audience de nombreux dossiers qui ont trait à la fraude aux prestations sociales. Ce mardi, 22 affaires, pour 28 prévenus, ont été jugées. Montant total du préjudice : 360 700 €.
« La lutte contre les fraudes aux prestations sociales n’est ni de
droite, ni de gauche, ni du centre. Il s’agit de la sauvegarde de la
protection sociale et des valeurs républicaines de solidarité envers les
plus faibles et les plus démunis, a rappelé la vice-procureur Lydia
Pflug lors de son réquisitoire d’introduction à l’audience du tribunal
correctionnel de Strasbourg. La justice doit signifier qu’on a raison de
rester honnête. Si la conscience ne parvient pas à prévenir
l’allocataire de la fraude, alors l’addition à payer sera in fine plus
lourde. Je crois en la vertu de la pédagogie d’une audience comme
celle-ci. Il est important pour le justiciable comme pour le citoyen de
voir qu’un contrôle et des sanctions existent. »
Sur le bureau de l’huissier, une vingtaine de dossiers attendent
d’être évoqués par la présidente Dominique Lehn. La caisse d’allocations
familiales (CAF) du Bas-Rhin, le conseil général (CG) du Bas-Rhin ou
Pôle emploi sont autant de parties civiles qui attendent le
remboursement des prestations indûment perçues par la trentaine de
prévenus. Ces derniers encourent jusqu’à deux ans de prison et 45 000 €
d’amende pour ces fausses déclarations de parent isolé ou ces revenus
dissimulés. Une peine qui peut monter jusqu’à cinq ans d’emprisonnement
si l’escroquerie est caractérisée.
Trafiquant de drogue et RMIste
À la barre, un couple de sexagénaires comparaît pour déclaration
mensongère. Séparés aux yeux de l’administration publique, les mariés
vivaient dans les faits, après une courte rupture, sous le même toit.
Les prévenus évoquent « un oubli » quant à la régularisation de leur
situation familiale et l’absence de déclaration concernant les nombreux
voyages entrepris vers le Maroc.
Photo DDM, archives. |
Un manquement puni de cinq mois de
prison avec sursis par le tribunal qui a également condamné les époux à
verser près de 8 000 € à la CAF et 15 000 € au CG 67.
Les concubins suivants, qui rendent pratiquement trente ans à leurs
aînés, sont présents à l’audience pour le même motif. À ceci près qu’il
leur est reproché d’avoir rédigé sur l’honneur de fausses déclarations
alors qu’ils vivaient des dividendes d’un trafic de cannabis chiffré à
50 000 € sur deux ans, affaire pour laquelle l’homme de 35 ans a été
condamné.
« Nous ne voulions pas profiter du système. J’avais simplement peur
de m’engager. J’étais immature, je ne savais pas si je voulais vivre
avec elle, se justifie Dominique Mundschau, bracelet électronique à la
cheville. Après, pour ce qui est de la paperasserie… » Depuis son
incarcération, sa compagne, dont il a reconnu les deux enfants en
prison, a vu ses aides sociales coupées pour amorcer l’esquisse d’un
remboursement. « Une simple amende n’aurait aucun sens, estime la
vice-procureur Lydia Pflug. Ils ont vécu aux crochets de la société en
profitant de l’argent d’un trafic de drogue. » Une remarque entendue par
le tribunal qui a condamné, en deçà des réquisitions, l’homme à quatre
mois de prison, sa concubine à deux mois de prison avec sursis, et le
couple à indemniser la CAF et le CG 67 à hauteur respectivement de 13
000 € et 9 500 €.
Seize mois d’allocations chômage indûment perçues
Avec ses 46 900 € d’allocations chômage trop perçues, le dossier
suivant fait partie des plus gros en volume financier de la matinée.
Durant seize mois, d’avril 2004 à juillet 2005, le prévenu a touché 3
000 € de Pôle emploi en plus des 2 000 € versés par son nouvel
employeur. « L’argent était transféré sur un compte joint. C’est ma
femme qui le gérait. Je n’ai pas vu que je continuais à percevoir des
allocations des Assedic. J’avais demandé à mon épouse de rectifier ma
situation auprès de l’organisme payeur, ce qu’elle n’a pas fait,
argue-t-il. J’étais en déplacement à Paris puis dans toute la France en
tant que représentant. Je n’avais pas le temps de m’occuper de cela. »
Son avocat, M e Francis Metzger, regrette que les gendarmes n’aient pas
enquêté plus avant sur les coups de téléphone et les connexions Internet
(pour les dater et les situer) qui ont fait perdurer cette situation
frauduleuse.
« Il menait grand train, déplore de son côté le conseil de la partie
civile, M e Anne-Marie Pettovic. Il était au courant des fonds se
trouvant sur le compte commun. Les chèques qu’il a signés en sont la
preuve. » Condamné à 4 000 € d’amende, conformément à la loi en vigueur
au moment des faits, le gardien d’immeuble à Cannes devra rembourser
intégralement Pôle emploi, qui a également obtenu 1 000 € de dommages et
intérêts.
L’audience s’est poursuivie, renvoyant ici un dossier pour un
supplément d’information, condamnant là à deux mois de prison avec
sursis une femme de 27 ans qui avait escroqué le conseil général « pour
percevoir le RSA et éviter de tomber dans la précarité ». Des sanctions
dont le ministère public espère qu’elles serviront d’exemple et de
leçon.
Source : DNA - J.-T.W - Mardi 21 février 2012
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